Bongo ou Ping : quels changements possibles ?

D’Ali Bongo ou de Jean Ping, les Gabonais et la communauté internationale sont dans l’attente des résultats de l’élection présidentielle qui s’est tenue samedi  27 août dernier au Gabon, le changement tant prôné par les 2 favoris  des 10 candidats de cette course à la présidence peut sérieusement être questionné.

Le changement est le mot d'ordre des deux favoris à la présidentielle Jean Ping et Ali Bongo

Jean Ping et Ali Bongo sont les deux favoris de l’élection présidentielle de 2016 au Gabon

Ali Bongo ou  ce qui n’a pas marché.

« Changeons ensemble », voilà un bien curieux slogan pour un président sortant, candidat à sa propre succession et qui porte à croire qu’Ali Bongo Ondimba, aurait lui aussi très mal vécu son dernier septennat. Son acharnement pour une rupture totale prouve bien que si l’histoire était à refaire lui-même ne voterait pas pour lui. Mais que faut-il changer au juste pour le fils de l’ancien président Omar Bongo Ondimba, élu pour la première fois en 2009 ?

On se souvient qu’à cette époque déjà c’était avec un pompeux « l’avenir en confiance » qu’Ali Bongo Ondimba s’était fait élire, une élection longuement contestée. Son programme économique centré sur 3 axes prévoyait de rendre le Gabon émergent en 2025 par une valorisation des valeurs écologiques en vue de la préservation de l’environnement et la promotion d’une économie verte,  un développement du tissu industriel local et  l’amélioration de la qualité des services au travers d’une ressource humaine bien formée.

Le plan idéal en somme.Invité devant le parlement le 28 juin dernier pour défendre son septennat, ABO se félicitait d’avoir sorti l’économie du  Gabon de la léthargie, en diversifiant les secteurs de rendement (agriculture, minerai, bois).Une économie mise à mal par l’effondrement du cours du pétrole ces dernières années. La construction des infrastructures notamment des transports, l’amélioration de l’accès à l’électricité ont été aussi citées dans les réalisations  de son mandat. Même si ce dernier a reconnu quelques insuffisances principalement sur la question du logement, son bilan semblait satisfaisant. 

Place  à  l’Homme.

Accusé par l’opposition d’entretenir un climat de peur, de privilégier  son clan au détriment de la méritocratie, en développant autour des institutions ,nombre de sociétés parallèles qui sous-traitent sans efficacité de nombreux services,  Ali Bongo invité sur un plateau d’Africa 24 rétorquait que la gouvernance se modernise, et que désormais l’État et ses services ne peuvent plus tout faire.

Tout de même dans son nouveau projet de société dévoilé à quelques jours des élections, il affiche trois axes prioritaires dont la paix, l’emploi pour tous, et de meilleures conditions de vie avec en toile de fond, 15 engagements pour que la méritocratie revienne. Ce qu’il convient de retenir dans cet autre projet c’est l’importance qui est accordée au changement d’attitudes, la place qui est donnée aux valeurs telles que le patriotisme, le gout de l’effort, l’abnégation…pour ce changement dans la continuité ABO place l’Homme au centre de ses priorités.

Jean Ping,  cet ancien nouveau.

Jean Ping 74ans, au regard de son background politique n’est pas à proprement parler le symbole du changement. Ce docteur en sciences économiques diplômé de  Paris-Sorbonne  est passé lui aussi par le moule Omar Bongo dont il fut pendant de longues années le directeur de cabinet. À partir de 1990, il va intégrer le gouvernement en devenant ministre de l’Information, des Postes et des Télécommunications, du Tourisme et des Loisirs, de la Réforme du secteur parapublic, il occupera jusqu’en 2008 pas moins de 5 postes ministériels. Diplomate chevronné par la pratique à plusieurs postes aux Nations unies, à L’OPEP, et à l’Union africaine, Jean Ping dénonce un climat de peur au Gabon, caractérisé par le clientélisme, le rançonnement des sociétés, une justice aux ordres, un taux de chômage inquiétant.

Exit la peur et le besoin.

Son projet de société qu’il a résumé ainsi : « un Gabon à l’abri de la peur, un Gabon à l’abri du besoin » vise objectivement à bâtir une nouvelle république, et faire ainsi entrer le Gabon au XXIème siècle. Ce projet dont il dit efficace parce que réalisable, crédible et finançable s’appuie sur une démocratie moderne, participative et inclusive.

Il prend en compte la société civile qu’il promet mettre à contribution pour des prises de décisions concertées. Une réforme constitutionnelle pour la limitation du nombre de mandats à 2, une immigration choisie pour la valorisation de l’identité gabonaise, autant de points saillants dudit projet.Sur le plan économique, ce fils d’ancien immigré chinois  entend faire du Gabon un partenaire fiable pour ses voisins et pour le reste de la communauté internationale. Il va ainsi réconcilier les Gabonais avec la richesse de leur pays.L’éducation et la santé occuperont une place de son choix dans son plan d’action avec des mesures fortes comme l’éducation obligatoire jusqu’à 16 ans.Cet originaire d’Omboué, ex-gendre du feu Omar Bongo  compte prioritairement sur sa maîtrise des rudiments de la politique nationale et internationale pour faire du Gabon ce pays de moins de 2 millions d’habitants, un endroit  où il fait bon vivre.

Des projets convaincants certes, mais les Gabonais peuvent-ils véritablement imaginer un changement avec ces hommes issus d’un même système ? Ce système qu’ils dénoncent chacun avec la plus vive énergie mais qui envers et contre eux même pourrait fatalement d’éteindre sur ce septennat du changement tant convoité. Les résultats du scrutin sont annoncés pour ce mardi 30 août.

Corinne Kamseu